Assurance, responsabilité civile et NVEI : où en sommes-nous ?

Alex
Rédigé le 7 octobre 2018
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Doit-on s’assurer de façon spécifique quand on circule à l’aide d’un engin électrique de type trottinette, roue, skate ou gyropode ? Peut-on le cas échéant se considérer couvert par la responsabilité civile de son assurance multirisques habitation ? À l’heure où les compagnies d’assurances commencent à élaborer des offres dédiées aux NVEI, essayons d’y voir plus clair dans ce qui est obligatoire et ce qui ne l’est pas.

Avant de commencer petite précision : l’idée n’est pas de rentrer dans le détail des subtilités de tel ou tel article de loi, mais plutôt de poser les grands principes du problème, afin de mieux comprendre les débats actuels et futurs sur le sujet.

Pourquoi s’assurer ?

Avec tout véhicule, il y a deux niveaux d’assurance : l’obligatoire et le facultatif. L’obligatoire, c’est la Responsabilité Civile (RC) : elle garantit la prise en charge des dommages que l’assuré pourrait causer à un tiers. Dit autrement, si vous foncez dans quelqu’un en trottinette et l’envoyez à l’hôpital, mieux vaut avoir une assurance en responsabilité civile. L’assurance facultative, c’est celle qui indemnise les dommages que vous ou votre véhicule subissez directement. Selon le contrat (et le montant de la prime), elle peut couvrir un large éventail de risques comprenant notamment le vol ou les dégâts en cas d’accident. Si vous possédez une voiture, vous connaissez déjà ces notions : l’assurance obligatoire est ce que l’on appelle le « tiers », tandis que le facultative peut aller jusqu’à la fameuse assurance « tous risques ».

C’est plus simple avec le vélo ?

Certaines formes de mobilité sont couvertes par des assurances à vocation généraliste : c’est notamment le cas du vélo. En cas de dommages causés à des tiers, vous pouvez généralement faire jouer la responsabilité civile de votre contrat d’assurance multirisques habitation. De leur côté, les enfants sont le plus souvent couverts soit par ce même contrat, soit par l’assurance scolaire.

Comment vérifier que l’on est bien couvert ? Votre contrat doit préciser que les déplacements en tant que conducteur d’un véhicule non motorisé (vélo, trottinette, fauteuil roulant, etc.) sont garantis.

Mais attention : pour que la responsabilité civile fonctionne, il faut que l’usage envisagé fasse partie des scénarios autorisés explicitement par le contrat d’assurance. Le cas échéant, elle refusera de vous indemniser. Autrement dit, si votre contrat précise que vous êtes couverts pour les véhicules non motorisés, c’est que vous ne l’êtes pas quand vous conduisez un engin moteur !

Suis-je assuré en responsabilité civile avec ma trottinette électrique ?

C’est donc la première question à se poser : il faut vérifier auprès de son assurance si les déplacements en tant que conducteur d’un véhicule électrique individuel sont garantis. Si c’est le cas, il faut également contrôler les éventuelles restrictions mises en place. N’hésitez donc pas à contacter votre assurance ou à demander une copie de votre contrat pour en vérifier les clauses exactes, et notamment le périmètre exact des événements garantis. Si votre assureur confirme la protection, sollicitez une confirmation écrite : elle pourrait se révéler utile en cas de litige ultérieur…

Le plus probable reste toutefois que l’usage de votre trottinette électrique ou de votre gyroroue ne soit pas prévu. La plupart des contrats ont été rédigés à une époque où l’on ne s’intéressait pas encore à ces véhicules. Si vous n’êtes pas couvert par défaut, vous devez donc réfléchir à la façon de vous doter d’une responsabilité civile, voire d’une assurance complète. On trouve déjà plusieurs offres dédiées sur le marché. Generali ou Eurofil (groupe Aviva) proposent par exemple des contrats estampillés « mobilité urbaine », destinés spécifiquement aux conducteurs de trottinette, skate, roues et gyropodes électriques.

Que proposent les assurances mobilité urbaine ?

Avec ces formules, vous disposez d’une assurance spécifiquement dédiée à la conduite d’un véhicule électrique mais attention : tous les engins ne sont pas éligibles ! Voici par exemple ce qui est garanti par Eurofil dans son contrat « On My Way » :

« les déplacements en tant que CONDUCTEUR d’un véhicule électrique individuel conforme aux normes européennes non soumis à obligation d’assurance (de type assurance auto ou moto) et dont la vitesse n’excède pas par construction 25 km/h. »

Le contrat (voir conditions générales en pdf) est donc adapté pour les offres en libre service de type Lime ou Bird. Il couvre également tous les engins détenus personnellement du moment qu’ils sont limités à 25 Km/h et assortis d’une déclaration CE en bonne et due forme.

La plupart des roues et trottinettes vendues en France offrent par défaut un mode limité à 25 Km/h, l’allure qui fait déjà consensus pour les vélos à assistance électrique (VAE). Beaucoup d’engins sont techniquement capables d’aller plus vite mais le débridage requiert une action manuelle de la part de l’utilisateur. En pratique, un expert pourrait analyser le véhicule impliqué dans un accident pour vérifier sa vitesse max réelle, mais il y a fort à parier que les assurances se rangent aux spécifications constructeurs dans la plupart des cas. Bref, on retombe ici sur une problématique de bonne foi…

Comment assurer une Dualtron ou autre engin surpuissant ?

Nous vous recommandons évidemment de jouer franc jeu : si vous avez l’intention de rouler à 50 Km/h et plus avec une trottinette grand format de type Dualtron 3 ou Dualtron Ultra, autant souscrire une offre adaptée. Certains assureurs acceptent d’émettre des contrats d’assurance considérant la trottinette ou la roue électrique comme un véhicule à moteur au même titre qu’un scooter ou une voiture. On dispose alors d’une carte verte, d’un macaron à coller à son engin et d’une responsabilité civile en bonne et due forme.

Reste à voir comment l’assurance se comportera face à un accident qui justifierait une indemnisation très importante : le statut d’une trottinette roulant à 50 Km/h sans plaque d’immatriculation est en effet suffisamment flou d’un point de vue réglementaire pour qu’elle soit tentée de se défausser de ses obligations… mais disons que c’est un autre sujet.

Notez enfin que le périmètre du contrat change. Dans l’exemple Eurofil, le conducteur est assuré personnellement sur tous les engins compatibles. Avec un contrat de type véhicule à moteur, c’est la conduite d’un engin précis qui est assurée !

Que va changer la future Loi d’Orientation de Mobilité ?

Fin septembre, la ministre des Transports Elisabeth Borne a affirmé dans les médias que la future loi d’orientation des mobilités clarifierait la situation des NVEI. Elle a notamment indiqué que le code de la Route serait adapté pour stipuler que ces engins électriques doivent circuler sur la chaussée ou sur les pistes cyclables, mais pas sur les trottoirs. Qu’est-ce que ça signifie ?

Concrètement, adapter le code de la Route signifie que les NVEI vont devoir rentrer dans la nomenclature qui définit les différentes catégories de véhicules autorisés sur la voie publique. Aujourd’hui, une trottinette ou un skate sans moteur est par exemple considérée comme un « accessoire pour piéton », autorisé sur les trottoirs. Un vélo à assistance électrique est lui considéré comme un « cycle » circulant sur la chaussée et sur les pistes cyclables. A l’inverse, un scooter électrique est considéré comme un véhicule terrestre à moteur », avec obligation d’immatriculation et port du casque.

Pour l’instant, nos trottinettes, roues et skates électriques n’ont pas de place précise : c’est ce que le projet de loi porté par Elisabeth Borne devrait changer. Pour tous les utilisateurs de NVEI, la question est particulièrement importante : les futures obligations en matière d’assurance et de circulation découleront en effet du résultat de cette classification !

Le courtier en assurances Wizzas, très actif sur le front des mobilités urbaines, a résumé de façon très documentée ces enjeux et l’implication des différents statuts possibles. On ne sait pas à ce stade si les NVEI seront assimilés à une catégorie existante ou si une case spécifique sera aménagée pour eux. Au-delà du droit à rouler sur la route, les pistes cyclables ou les trottoirs, la décision pourrait avoir un impact sur des questions telles que le port du casque, l’immatriculation ou la présence de dispositifs de sécurité spécifiques…

 

 

 

 

 

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4 Commentaires

  1. Un petit complément , certains contrat couvre deja les trottinettes et roues qui depassent le 25 par construction. Par exemple Ecencial et son contrat urban mobility qui est un des rares a s’être interssé Au sujet

    Répondre
  2. Il vaut mieux demander à vos assureurs s’il y a déjà une couverture pour vos engins à assistance électrique.
    Si c’est pas le cas, il vous dira s’il y a possibilité d’une couverture.
    Ce sera sûrement moins cher (voir même gratuit pour certains contrats), plutôt que de partir à l’aventure… 🙂

    Répondre

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